Dans le Financial Times du week-end15/16 avril, ce graphe sur la localisation des lieux de production des microprocesseurs. En 1990, l'Europe dominait le marché avec plus de 40% de la production devant les USA, un peu moins de 40% et le Japon pour environ 20%.
En 2030 selon les projections faites au travers de cet article, ces 3 régions ne produiront plus que 30% de ces puces devenues indispensables à la production de tout bien manufacturé. La Corée du sud, Taiwan et la Chine ont pris la place que les pays développés leur ont laissé. Ils auraient, à eux trois, près de 60% de part de marché en 2030.
Ces données permettent de comprendre les difficultés d'approvisionnement des pays développés au moment de la sortie de la pandémie. Les pays producteurs pouvaient être submergés de demande mais ils avaient aussi leurs propres arbitrages qui n'étaient pas forcément en leur faveur. On pense notamment à la Chine dont les relations avec les Américains étaient déjà très difficiles.
Au-delà des raisons historiques et politiques, on perçoit l'importance de Taiwan dans ce marché. Se réapproprier ce territoire donnerait aux Chinois un poids considérable et une capacité à réguler l'activité mondiale.
Pour les Etats-Unis, maintenir Taiwan dans sa zone d'influence c'est disposer d'une capacité d'innovation importante. Il n'est pas neutre que la grande entreprise de microprocesseurs, TSMC, ait décidé avec l'aide de Washington de construire deux gigantesques usines en Arizona. En cas de tensions en mer de Chine, les US auraient alors préservé une partie de leur indépendance.
L'Europe est clairement la région la moins bien placée dans ce combat de titans.
Sa part dans la production ne représenterait qu'une dizaine de pour cent au mieux à la fin de la décennie.
Comment dans ces conditions parler de réindustrialisation ? Est ce que cela peut avoir un sens lorsque la production du cœur des processus industriels n'est pas présente sur le territoire européen ? (C'est la question du paracétamol. Peut on produire le médicament et être indépendant si le principe actif est fabriqué ailleurs ?)
Ce graphe dessine la carte des rapports de force au sein des grands pays industriels. La mondialisation va continuer mais on ne peut pas douter que sa forme sera très différente de ce qu'elle était jusqu'alors. Il y a eu des transferts de technologies et il y a des lieux de production de grande taille en dehors des pays développés. C'est un levier terrible pour ces producteurs asiatiques et une source de lamentation pour les pays développés que de n'avoir pas eu la pertinence de penser que ces puces étaient l'or de l'industrie de demain.